GÉNÉALOGIE

lundi 30 décembre 2013
par  François DART

LA NAISSANCE sous l’ancien régime - (suite)

LE GOUT DU PÉCHÉ

Pour les moralistes et les confesseurs, le plaisir a un goût de péché, de péché originel, d’où une contradiction entre impulsion et morale, la peur du corps et les tabous sexuels. L’enfant, au XVIème siècle, devient synonyme du plaisir : il représente l’impureté de la procréation. Pour les catholiques, l’enfant est marqué par la certitude d’impureté et symbolise la force du mal. Pour Bossuet, l’enfance est la vie d’une bête et cette idée aura une influence dans la manière d’emmailloter l’enfant pour l’empêcher de marcher à quatre pattes, tel un animal.

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La femme, pour l’Église, présente deux visages. D’une part, Eve tentatrice, mais aussi notre mère, personnifie les forces dangereuses communes à toutes les femmes. D’autre part, Marie, mère vierge de Jésus, incarne les vertus de charité, d’humilité et d’obéissance. Pour les hommes d’église, toute femme représente un être contradictoire par qui peut venir aussi bien la miséricorde que la damnation. Le sacré côtoie la concupiscence du péché de la chair, il y a là quelque ambiguïté.

La femme enceinte est un mélange d’impureté et d’animalité. Le ventre maternel est redouté, si grand est son mystère et est l’antre du diable.

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LA FEMME, LE DIABLE ET L’ENFANT

Tout commence donc au mariage dont le seul but, selon la foi catholique, est la procréation.

Mais déjà, des écueils se dressent. Rien n’est simple dans la société d’autrefois, tant au plan de la conception qu’à celui de la grossesse, et bien des questions méritent d’être posées et analysées.

Comment la stérilité est-elle vécue ?

Quelles sont les connaissances médicales sur la femme ?

Quels comportements régissent ces domaines ?

Dans les sociétés anciennes, la maternité est le point culminant de la vie d’une femme et un certain mépris s’attache à une femme inféconde.

LA STÉRILITÉ

Celle-ci concerne environ 6% des couples, et elle est maudite et honteuse à la fois, évoquant la sécheresse de la terre et la famine. Dans ce monde essentiellement rural, la stérilité est néfaste et la disette d’enfant représente un châtiment. Dès le mariage, des pratiques sont donc observées pour garantir la fécondité.

La seule cause admise de la stérilité d’un mariage est l’impuissance du mari. Elle résulterait d’un mauvais sort lancé le jour du mariage. A l’époque, on associe la stérilité et l’impuissance, par contre. si le mariage est consommé, c’est alors la femme qui est accusée de stérilité. C’est elle l’alliée du diable. Si on ne la rejette pas vraiment, elle provoque méfiance et crainte malsaine.

Pour les coutumes censées favoriser la fécondité du couple, chaque région avait "sa recette" propre dont beaucoup d’entre elles avaient recours aux saints intercesseurs et même des pèlerinages dans des lieux spécifiques ou aussi à des médailles ou des reliques.

(La reine Anne d’Autriche a prié Notre Dame de Bon Remède à l’abbaye Saint-Michel-de-Frigolet près de Tarascon, en Provence, pour avoir un fils et son vœu fut exaucé puisqu’elle mit au monde le futur Louis XIV et le duc Gaston d’Orléans ! l)

Certains de ces rites ont survécu. Leur multiplicité et leur pérennité semblent prouver l’universelle préoccupation de voir la cérémonie nuptiale aboutir à une naissance.

LA CONCEPTION

En réalité, la conception reste fort longtemps un mystère. Découverte des spermatozoïdes à la fin du XVll èrne (1677) et on ne connait pas le cycle féminin avant la fin du XVlll ème.

Pour le médecin du XVI ème siècle, le mystère reste celui de la procréation.

La mère est regardée comme une créature inférieure et Ambroise Paré accorde un rôle essentiel à la matricer dans la conception. La matrice est décrite avec un mélange d’admiration et d’effroi : émerveillement devant l’œuvre de la nature mais aussi crainte profonde et tenace devant œ gouffre obscur des origines qui donne la vie, mais aussi la mort !

Aux XVl e et XVll e siècle, les médecins répètent que l’acte sexuel dans le mariage doit uniquement être destiné à la procréation. Ambroise Paré qui explique que Dieu a créé le plaisir pour que l’union puisse se faire.

La conception obéit à des rythmes religieux ou saisonniers. Le couple est interdit de relations sexuelles pendant les périodes de pénitences religieuses : l’Avent, le Carême jeûne et abstinence.

Les textes médicaux confortent ceux des théologiens, laissant planer la menace d’une progéniture débile et contrefaite en cas de non respect des règles religieuses, en établissant une liste des différents jours au cours desquels il faut éviter tout rapport sexuel.

Les interdits ecclésiastiques sont massivement respectés.

Les périodes de gros travaux d’été ne sont pas non plus des périodes de conception : elles se situent de préférence en mai et juin, pour des naissances aux alentours de février et mars. Les registres paroissiaux le prouvent clairement !

à suivre


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