Le jardin botanique et des plantes médicinales de Grande-Synthe

lundi 23 juillet 2012
par  François DART

Un beau jour que j’écoutais le guilleri des oiseaux
- activité que je ne saurais que trop vous conseiller
- un ami agacé par mon silence, voyant mon regard perdu sur la ligne opale de l’horizon, me proposa de rencontrer un puits de science passionné de plantes médicinales.

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André Caudron

Phytothérapeute et inventeur d’une plante en cosmétologie

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À l’énoncé de son nom, je me demandais s’il pensait aux plantes médicinales pour un usage curatif qui m’était destiné ou simplement pour l’intérêt qui’il porte au monde végétal ... C’est ainsi que je rencontrais le professeur Caudron.

Bien connu des Calaisiens, André Caudron a tenu une officine de pharmacie à l’angle de la rue du 11 novembre ainsi qu’un laboratoire avec 12 chercheurs, durant presque une cinquantaine d’années.

Professeur à l’institut supérieur d’agriculture de Lille et chargé de cours de phytothérapie à la faculté de pharmacie de Lille, à l’école des plantes de Bailleul, ainsi qu’à Paris, il est parfois sollicité pour animer des colloques à l’étranger.

Il refuse aujourd’hui des épreuves par trop fatigantes, se “contentant” de faire avec sa voiture le trajet Calais-Grande-Synthe-Calais pour effectuer des visites guidées de trois heures sous un soleil de plomb avec une prothèse de la hanche, puis d’autres visites-guidées dans le jardin de la Maison de la Flore à Ardres et en septembre dans un sentier de plantes médicinales à Mouans-Sartoux dans les Alpes Maritimes !

Il faut dire qu’il n’a que 88 ans.

Ce jeune chercheur poursuit si bien ses expériences, que le ciel lui a envoyé, probablement par les bons soins des déjections d’un oiseau migrateur, une plante nouvelle qui s’est plue à Grande-Synthe : l’onopordum acanthium qui est pour lui une consécration puisqu’il laissera son nom à la postérité.

Auteur de nombreux articles et ouvrages spécialisés, dont les deux derniers
- Plantes médicinales, usages et formulations
- et Les plantes médicinales des zones humides et leurs usages thérapeutiques avec le professeur Bruno de Foucault
- André Caudron travaille depuis de nombreuses années sur l’interaction des plantes, symbiose et télétoxie (elles s’assemblent ou se détruisent)

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“Par exemple, quand je plante un pommier, je plante un Viburnum à côté, parce que leur cortex racinaire contient des bactéries qui vont lutter contre les maladies cryptogamiques du pommier (champignons).

Autre exemple, le Diplotax Tenufolia supprime l’oïdium des plantes voisines... Ce sont des phénomènes formidables ! Là je travaille avec un agriculteur, Benoît Butez, pour réduire les pesticides dans les champs.”

Si vous le suivez, il vous présentera la Pétasite, toxique avec ses énormes feuilles dont les racines sont utilisées contre les allergies, la superbe Belladone aux fruits noirs, le Lyciet d’Europe dont on suppose que les branches épineuses flexibles ont servi à former la couronne du Christ, et mille autres plantes médicinales.

Montrant un coin du jardin : “J’ai voulu que toute cette parcelle-là se meuble toute seule. C’est extraordinaire ce qu’on y trouve”... ainsi des Bleuets sauvages, ou encore du Millepertuis dont on fait de l’huile pour les petites brûlures et coups de soleil, et en usage interne contre la dépression et d’après de récents travaux contre le bégaiement.

Reconnaissant, le professeur Caudron ne manque pas de remercier la ville qui lui a permis d’enrichir sa passion et ses champs d’expérience, et Edith Dhaine des services Espaces Verts qui a créé le jardin de la ferme des Jésuites avec lui : “Je dois beaucoup à la Ville de Grande-Synthe, dit-il, avec ce jardin de la ferme des Jésuites, créé il y a dix ans. C’est un terreau superbe parce que les chevaux l’ont précédemment amendé de leur crottin durant vingt ans !

Dans le jardin de la ferme des Jésuites, la sécheresse de cet été a asséché le plan d’eau autour duquel poussent les plantes de milieux humides, comme cette rare Mimulus Luteus (les fleurs jaunes), plante tonicardiaque qu’André Caudron a retrouvé dans la vallée de la Course où se trouvait un jardin botanique au XVIè siècle. Mais les plantes ont de la ressource.

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Ci-dessus, on voit que la transpiration de la plante forme un réservoir de sécrétions à la base de la feuille du Dipsacus dite “Cabaret des oiseaux”, puisque ceux-ci viennent s’y désaltérer.

“Il n’y a pas de mauvaises herbes, explique-t-il, il n’y a que des plantes que l’on n’a pas encore étudiées. 18% seulement des plantes de notre planète ont été étudiées. La plupart d’entre elles ont certainement une indication thérapeutique. C’est à l’homme de les découvrir. Il reste beaucoup de travail à faire...”

Si vous avez l’âme romantique, des vers de Verlaine vous reviendront en mémoire... “Voici des fruits, des fleurs, des feuilles et des branches, et puis voici mon coeur qui ne bat que pour vous, ne le déchirez pas avec vos deux mains blanches et qu’à vos yeux si beaux, l’humble présent soit doux.” Si vous avez l’âme scientifique (ce n’est pas rédhibitoire), vous verrez aussi par exemple que :
- l’Echinacea est une plante antivirale, utilisée en teinture contre l’herpès et le zona.
- la fleur jaune de l’Aristoloche (plante méditerranéenne) possède un tube contenant des poils à l’envers qui empêchent l’insecte pollinisteur de resortir... “Je suis en extase devant la nature” s’exclame à ce propos notre mentor.
- une plante d’origine espagnole aux beaux fruits couleur cassis, a pu s’adapter : la Phytolaque. On l’utilise pour soigner les angines et infections de la gorge. “Il fut un temps où certains viticulteurs espagnols ajoutaient ce fruit pour colorer davantage le vin rouge. Le problème, c’est qu’il contient un acide terriblement laxatif ! rit-il” Les Physalis Alkékenge sont assez envahissantes dans les années qui suivent leur plantation. Surnommées Amours en cage, elles cachent dans leur coque orange une baie qui agit contre les cystites lorsqu’elles sont associées à la baie de genièvre.

Surpris de découvrir une nouvelle plante dans le jardin, il y a quatre ans, le professeur André Caudron a étudié l’Onopordum Acanthium, lui découvrant une capacité de ralentissement du vieillissement des cellules de la peau.

Lors d’un colloque international à Digne-les-Bains, un des directeurs de Gatte et Fossé, société ayant 52 laboratoires dans le monde, s’est déclaré très intéressé par sa découverte, puis a approfondi l’étude de celle-ci, aboutissant à la commercialisation uniquement en pharmacie d’une gamme de crèmes comportant des huiles essentielles bio. Si l’on trouve aussi L’Onopordum Incantium dans d’autres régions, elle y est beaucoup moins riche en principes actifs. La différence vient de la qualité du sol ! Aussi, le labo en développe la culture à Grande-Synthe. Et depuis quelques mois, un brevet d’inventeur d’une plante en cosmétologie pour un nouvel extrait d’Onopordum Acanthium a été déposé à son nom.

Etonnante et jolie histoire, non ?

En saison d’été, vous pourrez suivre une visite guidée par l’intarissable et passionnant Professeur Caudron au jardin du Parc du Moulin, second jardin élaboré par la ville de Grande-Synthe.

L’entrée est gratuite sur inscription obligatoire à l’Office de Tourisme de Grande-Synthe au 03 28 27 84 10 .

- Ou à Ardres, à la Maison de la Flore, rue des Rainettes. Réservations au 03.21.82.89.27


A noter :

Conférence du Professeur Caudron " Mieux connaître les Plantes Médicinales"

Samedi 13 août à 14h30 dans le Jardin des Plantes Médicinales de l’Abbaye de Vauclair.

Une conférence du Professeur Caudron (Docteur en Pharmacie - Professeur à l’ISA de Lille - Co-fondateur de l’Ecole des Plantes de Bailleul) sur le thème "Mieux connaître les Plantes Médicinales" sera donnée le samedi 13 août à l’Abbaye de Vauclair.

Les ouvrages du Professeur Caudron seront disponibles à la vente à l’issue de la conférence.

Participation gratuite. Renseignements et inscriptions au 03 23 21 68 77 .




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