Les accordailles

mardi 2 octobre 2012
par  François DART

(Vieilli) (Par extension) Fiançailles.

Reprise de la Chouette 2 ième semestre 2009

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ACCORDAILLES /a.kɔʁ.daj/ féminin pluriel (Vieilli) (Désuet)
Réunion qui se fait pour signer les articles d’un contrat de mariage.

Citation : Y a que je viens te prier de prier mam’selle Suzon, ta fille, et toi, de venir assister en propres personnes au repas du festin de mes accordailles, dans un cabaret, avec une jolie demoiselle, que je donne là au coin de la rue. — (Carmontelle, Ça n’en est pas dans Vingt-cinq proverbes dramatiques, 1774-1781, nouvelle édition, 1878, scène 5)

Les accordailles se font toujours entre le jeune homme et la jeune fille, les parents n’étant consultés que par la suite. S’ils ne refusent pas leur consentement, les deux familles se réunissent, et le prêtre a mission de rédiger le contrat. — (Pierre Louÿs, Lesbos aujourd’hui, 1901, dans Archipel, 1932)

Ils se fiancent de cœur à celle qui leur donnera avec onction la divine accolade et les fera vraiment nubiles pour des accordailles supérieures à toutes celles que les officiels notaires cimentent et que les prêtres bénissent, chaque jour, du haut en bas de l’échelle stercoreuse de notre poulailler social. — (Octave Uzanne, Le Célibat et l’Amour : traité de vie passionnelle et de dilection féminine, Mercure de France, 1912, p. 44) (Figuré) Union.

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1.La saison des Accordailles

La saison des accordailles : vieux mot expressif et juste ! Qu’est-ce que le mariage, sinon un accord, parfois difficilement réalisable au milieu de mille convenances diverses et beaucoup d’intérêts. Dans les familles aisées, au XIXè siècle le mariage entre deux personnes qui ne se sont jamais vues, est souvent organisé par des tiers, des « marieuses » souvent de vieilles demoiselles de la bonne société, cousines ou amies des familles. La première rencontre a lieu dans un bal de débutantes, à l’église, au théâtre ou dans des ventes de charité. Si l’on veut donner suite au projet, l’aspirant est présenté aux proches de la jeune fille commeun homme que l’on peut recevoir, mais pas comme un futur membre de la famille. Afin d’éviter l’opération toujours délicate de la rupture. En suite les parents de la jeune fille permettent au prétendant de leur rendre visite plus souvent et à « faire sa cour » sous la haute surveillance d’un Chaperon, la mère ou une parente, dans la discrétion la plus totale. La jeune fille doit se montrer réservée et manifester une tendresse contenue vis à vis de son prétendant afin qu’il n’y est aucun doute sur sa pudeur. Elle ne lui écrit pas et ne reçoit pas de lettre de lui sans passer par le chaperon. Le père du jeune homme et le père de la jeune fille se rencontrent afin de discuter du chiffre de la dot, des éventuels héritages, de la situation exacte du jeune homme, et parfois même de la carrière probable du Prétendant. Les notaires des deux familles se chargent de confirmer cet échange de renseignements. Lorsque tout le monde est d’accord, le parent le plus proche ou un ami du jeune homme porte sa demande à la famille de la jeune fille. Le jeune homme et ses parents sont alors invités à dîner chez la demoiselle. Le prétendant devient le fiancé officiel, on y arrête la date de la cérémonie officielle des fiançailles. Dans les familles campagnardes pas de premier bal, ni théâtre souvent les rencontres se faisaient à la sortie de l’église les fêtes du village, les moissons (battage) dans les foires, mais aussi dans les champs lorsqu’ils gardaient les animaux, les feux de la St Jean (24 juin) qui se déroule la nuit(bon prétexte à des promenades discrètes). Pour une famille rurale, la faute d’une jeune fille reste le plus terrible des affronts. Souvent on pensait que cela n’arrivait que dans les campagnes, qu’aux servantes, à la population nomade et mendiante. Il est vrai que les jeunes filles, font l’objet d’une surveillance étroite et d’un encadrement assez serré par les parents, les frères, et même par le Clergé. Il faut savoir qu’autrefois le choix du conjoint n’est pas l’affaire de deux personnes, mais de deux familles et parfois même du village. Il est d’usage de se marier dans son milieu, et souvent dans le même village. Il faut savoir qu’on répugne à épouser un étranger, et l’on sait qu’à ces époques là, quelques kilomètres suffisent pour se voir considérer comme tel. Et l’amour dans tout cela ? on peut se poser la question. L’agrandissement du patrimoine foncier a évidemment longtemps été une des grandes préoccupations des paysans en matière de mariage. Jean-Louis Beaucarnot indique dans son livre « comment vivaient nos ancêtres » Dans chaque famille dont, les anciens mémorisent tous les réseaux de parentés et d’alliances. Ils retiennent dans certaines régions, toute une série d’informations sur les dots versées par telle ou telle famille. Souvent ils poussent aussi les jeunes à des mariages doubles. Epouser la sœur de la femme de son frère permet de rester en pays de connaissance, et d’économiser la dot Dans certaines régions ces traditions se maintiennent jusqu’à la fin du XIXè siècle. Souvent dans les familles aisées ou rurales et même dans les familles royales ont se marié entre cousins. Lorsque l’on fait des recherches généalogiques on s’aperçoit que le maire, le curé et le notaire qui reçoivent les actes portent le même nom et sont proches parents. Dans les régions isolées, l’habitude s’est perpétuée pendant longtemps. Lorsque l’église limite l’interdit de parenté au degré de cousin issu de germain en 1917, la Corse, la Bretagne, les Alpes, l’Auvergne, les Pyrénées ont ainsi continué à consommer bon nombre de dispenses de parentés, jusqu’à la dernière guerre. Mais revenons à nos fiançailles ! Le jour ou le prétendant devient le fiancé officiel, dans certaines régions, c’est ce soir là que le fiancé offre la bague à la jeune fille. Elle est autorisée à lui en offrir une, huit jours plus tard, avant le dîner que les parents du jeune homme donneront en retour… Dans les familles aisées dès que le « oui » de la demoiselle sera prononcé, elle recevra chaque jour un petit bouquet de fleurs balances qui rosiront peu à peu et deviendront, symbole d’amour ardent, la veille des noces. Cette tradition se termine avec le XIXè siècle. Au xxè siècle, le fiancé offre le jour du mariage une somptueuse corbeille, par tradition blanche, enrubannée. S’il veut faire grandement les choses, il n’oubliera pas sa future belle-mère ! Heureusement les nouvelles mœurs donnent aux jeunes gens et aux jeunes filles une indépendance que n’ont pas connu leurs aînés. Après la guerre, ils ont acquis une grande liberté de pensée, de parole et de conduite. Ils choisissent leurs occupations, leurs relations, leurs plaisirs. Les parents ne peuvent plus prévoir et combiner à leur aise le mariage de leur progéniture. Les jeunes gens modernes ne laissent plus aux parents, encore moins aux intermédiaires bénévoles, le loisir de conduire les pourparlers. Ils font eux-mêmes leur choix.

2.LA DOT :

Constituer une dot est, jusqu’en 1920, un devoir social. Les parents ont consacré leur vie à amasser le petit sac d’or qui a grandi et grossi en même temps que la demoiselle. Dans le camp des épouseurs, les coureurs de dots se préparent depuis l’adolescence afin de leur apporter la sécurité pour leurs vieux jours, la dot qui rend même charmante la plus laide des filles, la dot qui dispense de l’effort personnel, du travail intense. Ils sont aidés dans leurs recherches par les notaires ; En 1906 les adversaires de la dot disent qu’elle cause de la dégénérescence de la race par l’âpreté avec laquelle les familles des jeunes gens la recherchent sans regarder les qualités de celle qui l’apporte. Ils citent les « Avortons » riches que fondent des familles et les saines et belles jeunes filles que leur pauvreté condamne au célibat. La Grande Guerre de 1914 a apporté le changement dans les mœurs matrimoniales. L’impossibilité de mettre de l’argent de côté, le progrès du féminisme et la libération de la jeune fille moderne font disparaître cette coutume qui prenait une grande place dans la vie sociale de nos aïeux et qui maintenant est inconnu de notre génération. En 1925 : il n’y a plus de coureurs de dots, et pour cause il n’y a plus de dots. Les jeunes filles émancipées mettre leur honneur à ne plus être achetées : elles veulent être recherchées pour elles-mêmes. Elles se flattent d’apporter à leur mari une collaboration plus efficace que celle d’une liasse de francs : un métier, un capital-travail.

Dans les campagnes, la dot est souvent constituée, de terre. Il arrive que l’on soit amené à prendre des dispositions pour regrouper des terres provenant de chaque famille. Dans les familles les moins aisées, il est de coutume à cette époque qu’un couple ne convole pas tant qu’il n’a pas de moyens d’existence par son métier ou par les biens que donnes les parents, et nombreux sont les jeunes gens qui, avant de s’établir, s’efforcent d’amasser un petit pécule en allant travailler en ville.

3. LE TROUSSEAU

C’est toujours la famille de la mariée qui le fournit. La quantité d’objets que comporte un trousseau est absolument facultative et dépend non seulement de la somme que l’on attribue à cet achat mais encore des habitudes : même parmi les familles qui peuvent avoir du beau linge, il en est qui préfère la quantité à la qualité. Quantité absolument nécessaire dans les campagnes où on lavait seulement le linge par grande quantité dans des lavoirs publics qu’une fois par an. Les femmes du XXè siècle sont beaucoup plus raffinées, plus soignées que les femmes de jadis qui sacrifiaient tout au « paraître » : sous leurs robes magnifiques, elles portaient des chemises de toile épaisse, des corsets meurtriers, il fallait souvent une pièce spéciale pour contenir les armoires ventrues et le précieux trousseau encombrant. En province, la lingerie prend une large place dans les occupations féminines et la plus part des jeunes filles exécutent entièrement leur futur trousseau. J’ai retrouvé dans les armoires chez ma Grand-Mère et dernièrement chez ma Belle-Mère des chemises et des jupons brodés par elles-mêmes. J’ai même trouvé des draps et des nappes avec les initiales des familles. Je les garde précieusement. La Parisienne moderne de 1906 a souvent fort à faire pour trouver de quoi se vêtir. Quels soucis, les dessous ! Elle a à sa disposition les catalogues de lingerie : linons transparents, valenciennes, aux points d’Alençon, des batistes, de superbes toiles, des chemises magnifiques égayées de rubans, des caches-corsets, des jupons aux broderies harmonieuses.

La publicité des trousseaux tient une place importante dans les magazines jusqu’au milieu du XXè siècle. Le trousseau du jeune homme est fourni par lui, il comprend le linge de corps. A partir de 1928, il arrive que les fiancés apportent chacun leur linge de corps et que les frais nécessités par l’achat du linge de maison soient supportés par le jeune ménage.

Dans les campagnes, la jeune fille a un trousseau d’autant plus important que sa famille est riche et aisée. Les cas sont donc très variés dans ce domaine, depuis celle qui n’a que quelques chemises de lin ou de chanvre, jusqu’à cette autre jeune fille dont les parents ont donné du linge de corps en coton, trois douzaines de chemises de jours, et autant de nuit, trois douzaines de draps, serviettes, taies, nappes.

4. LES FIANCAILLES OFFICIELLES

Jadis les fiançailles avaient un caractère très solennel et religieux un ecclésiastique était souvent appelé afin de bénir cette « préface » du mariage. Le repas de fiançailles était modeste :

Dîner de fiançailles

Menu

Hors d’œuvre variés Langouste en Bellevue Pâté de Lorraine Chateaubriand sauce madère Jardinière Poulet de Bresse Salade Glace vanille Gâteaux Desserts assortis Fruits

Vins

Graves, St Emilion Beaune Champagne

C’est ce qu’ils appelaient un repas modeste, nos anciens avaient un solide appétit !!!

Depuis 1893, la fête est intime, seuls les familles et les amis très proches prennent part à un repas très élaboré et copieux souvent servi dans la maison de la jeune fille. Les autres relations sont informées par courrier. Lorsque le cercle des relations est très étendu, on fait, l’annonce dans la rubrique moderne des journaux. Selon certaines superstitions, afin d’assurer le bonheur conjugal, la fidélité réciproque, la fiancée doit mettre le jour des ses fiançailles des œillets roses dans ses cheveux. Les fiançailles officielles durent entre trois semaines et quelques mois. Deux mois semblent être la moyenne avant que ne soit célébré le mariage.

Après la Première Guerre Mondiale l’attitude des fiancés et de plus en plus libre ; Les surveillances d’autrefois semblent une véritable tyrannies pour la femme moderne. Pendant les six à huit mois que peuvent durer les fiançailles officielles, ils sortent ensemble, font des promenades et des achats sans être chaperonnés mais attention il leur est vivement conseillé de garder leurs distances et les douceurs du tête-à-tête pour les premiers temps du mariage. Ils peuvent s’écrire sans que les parents ne lisent leurs lettres, on leur recommande seulement de respecter la plus grande réserve dans l’échange de leurs sentiments. C’est à cette époque que l’on trouve le plus de cartes postales fleuries, romantiques où les hymnes à l’amour y sont tout imprimés. La mode des « bijoux d’amour » fait fureur : ils deviennent aussi des messagers.

En 1926, au début des fiançailles officielles, le code des convenances conseille de ne pas se tutoyer : Des très intimes amis d’enfance, se tutoyant jusque là, doivent adopter le vouvoiement en public.

L’échange des photos reste l’un des premiers cadeaux traditionnels des fiancés. Elle lui offre un portrait récent, dans une tenue élégante, qu’elle dédicace : « A celui que j’aime pour la vie », « A l’élu de mon cœur »… Il procède de même en donnant une photo de grand format, en costume courant, dans une pose aussi naturelle que possible. Au dos les messages de tendresse les plus divers : « Pour la vie », « Je meurs ou je m’attache » A partir de 1900, lorsque les familles jugent opportun de publier les fiançailles, chacun se charge de prévenir ses relations le plus rapidement possible.

Pour célébrer l’évènement deux repas seront donnés le premier chez les parents de la jeune fille, le second chez le jeune homme. Les amis intimes y sont conviés afin de faire les présentations. Les amis, les relations intimes font envoyer des bouquets blancs et roses qui décoreront les pièces de réception. En retour, les fiancés adresseront à tous une photo de souvenir enrubannée de rose et de bleu. Dans bien des cas, ces portraits tiendront lieu de faire-part, les fiançailles se célébrant souvent dans l’intimité familiale.

Dans nos campagnes, cette période « des fiançailles » était plus modeste même si la durée restait la même. La première formalité est de « publier les bans » tant à la mairie qu’à l’église.

5. LES BANS

Les bans sont un engagement, une promesse, ils correspondent donc à l’annonce du projet de mariage, ils sont affichés à la mairie ainsi qu’à l’église et ensuite dans la presse. Ils sont souvent proclamés en chaire, au moment du prône, trois dimanches de suite ou les jours de Fête. Ils doivent avoir lieu dans les deux paroisses des futurs mariés car le jeune homme a besoin d’un certificat de publication des bans dans sa paroisse d’origine qu’il doit fournir au clergé de la paroisse de sa fiancée où se tiendra le mariage. Cette pratique permet au clergé de garder le contrôle de la foi de ses ouailles. Les bans servent en effet à rendre possible le mariage, sur le plan légal comme sur le plan religieux, en vérifiant l’état civil, l’inexistence de parentés trop proches entre les jeunes gens ou quelque autre empêchement. Comme nous l’avons vu plus haut, l’Eglise interdisait les mariages entre cousins du quatrième degré.

Quant aux fiançailles à proprement parler, elles ne sont pas officialisées mais sont quasiment obligatoires. Il existe une liturgie de fiançailles et un rituel spécifique pour la messe d’engagement, mais les actes de fiançailles sont rarissimes. Il est fréquent qu’il y ait une messe, mais on enregistre pas les promesses de mariage sauf cas exceptionnel.

Dans nos campagnes, la journée des fiançailles est en général marquée par une collation ou par un repas, bruyant, gai et largement arrosé chez les parents de la jeune fille. Dans certaines régions de France c’est ce jour là que le jeune homme offre l’anneau de fiançailles en 1835 les anneaux d’argent valent 2 à 3 francs, mais ceux qui sont en or coûtent de 15 à 20 francs. Le futur marié peut faire selon ses moyens d’autres menus présents, épingles de cérémonie, fleurs d’oranger, bagues de fantaisie portant deux cœurs enlacés, des broderies (ceinture brodée de fils d’or ou d’argent) boucles d’oreilles, médailles. La fiancée offre parfois au jeune homme une montre, une bague genre chevalière. En Bretagne cela peut être des rubans à chapeau, un missel, une tabatière.

6. LA BAGUE DE FIANCAILLES

Dans la plus part des familles, le fiancé apporte lui-même la bague présentée dans un écrin blanc que la fiancée ouvre ; mais c’est le jeune homme qui passera la bague au quatrième doigt de la main gauche (l’annulaire) dans l’intimité. Bien sûr, la jeune fille est consultée pour le choix de la pierre. Dans les familles aisées, la préférence se portera sur le saphir, le rubis, l’émeraude en cabochon et le diamant en solitaire. On ne donne jamais une bague de fiançailles ornée d’une perle, qui dans le langage des bijoux, représente paraît-il une larme. Une opale ou une turquoise soi-disant funeste quand on la reçoit en présent. Au début du XXè siècle dans les familles aisées, l’émeraude fait fureur, elle s’accompagne des plus heureux présages « Celui qui possèdera une émeraude aura le bonheur constant !! Les siècles passés l’ont considérée comme un talisman.

- Le diamant, symbolise l’amour, la paix, la fidélité aux engagements.
- Le saphir, est l’image de la franchise, la conscience droite.
- Le rubis, la beauté, l’élégance et la sécurité.

Il n’est pas obligatoire d’offrir une bague au fiancé, mais beaucoup de jeunes filles offrent une chevalière en or que le jeune homme porte au cinquième doigt (auriculaire) de la main gauche.

7. LA ROSIERE

Afin de mettre à l’honneur la Vertu, dans l’Oise, les Deux-Sèvres, le Lot-et-Garonne, la Gironde et aussi dans la Seine, un jury de notables civils et religieux, aidé de commères bien informées, se réunit afin de récompenser chaque année, avec beaucoup d’éclats, une jeune fille, souvent de condition très modeste, mais très appréciée de tous pour ses qualités familiales mais surtout pour sa grande réputation de vertu. Dans certains villages, on met dans l’urne électorale une quantité de bulletins blancs égale au nombre de jeunes filles « Vertueuses » mais sur l’un d’entre eux, on ajoute « Dieu l’a choisie » Devant Monsieur le Maire, elles tirent de leur main droite dans l’urne. La demoiselle qui ramène le bulletin écrit est proclamée Rosière. Au cours d’une cérémonie religieuse, habillée de blanc, elle reçoit une couronne de roses blanches, symbole de la pureté, attribut de la vertu féminine, figuration de la Vierge. A la fin de la messe, pendant que les cloches sonnent à toute volée, derrière le garde champêtre et son tambour, la Rosière rougissante traverse le village au bras de Monsieur le Maire, suivi de la Rosière de l’année précédente au bras du premier adjoint. Parfois la couronne de roses est accompagnée d’un bijou mais plus souvent d’une somme d’argent ou d’un livret de caisse d’épargne. Certaines commune dotaient d’une somme considérable une jeune fille vertueuse afin de l’unir à un ancien combattant de bonne conduite. Cela ne fait jamais qu’une cérémonie supplémentaire afin de distraire nos ancêtres durant ce joli mois de mai.

8. LE TEMPS DES MARIAGES

Les mariages n’ont pas lieu à n’importe quel moment de l’année ni n’importe quel jour de la semaine car, pour des raisons pratiques ou selon les traditions religieuses et culturelles, il y a des moments prohibés et d’autre plus usuels. La majorité des unions obéit donc, dans l’ensemble, à des contraintes de temps qui ne s’estompent que dans la moitié du XXè siècle. Trois ou quatre raisons permettent de comprendre que certaines périodes ne conviennent pas à la célébration des mariages. L’Eglise tout d’abord impose une série d’interdits religieux en relation avec le calendrier liturgique, pendant l’Avent, mois de la préparation de la venue du Christ (décembre) et, surtout, à l’occasion du Carême, c’est à dire pendant les quarante six jours qui s’échelonnent du mercredi des Cendres à la fête de Pâques, où l’on doit faire jeûne et abstinence, ce qui s’entend non seulement sur le plan alimentaire mais aussi dans le domaine des relations entre époux. La deuxième prohibition est plutôt coutumière et concerne les mois les plus froids, qui empêchent de se réunir facilement (janvier) ou le mois de mai souvent considéré comme « tabou » Certains y voient encore l’influence catholique, car c’est le mois de Marie, donc de la virginité, mais il semble que cet interdit soit beaucoup plus ancien et les proverbes s’en font l’écho. Le troisième empêchement est d’ordre économique et pratique : Les travaux agricoles ou les campagnes de pêche nécessitent d’utiliser chaque semaine à plein et il est donc impossible d’organiser les fêtes du mariage au moment des foins, des moissons ou en d’autres lieux, des vendanges ou des expéditions de pêche à la morue ou à la sardine. L’été se trouve bien compromis ainsi que l’automne. C’était un sacré sport pour trouver une date.

9. LE CONTRAT DE MARIAGE

La soirée du contrat au début du XXè siècle, plus d’un tiers des mariages sont précédés de contrats et sur ce nombre, un huitième adopte le contrat dotal. Les départements où ce régime prévaut sont l’Ardèche, l’Aveyron, le Cantal, le Gard, et l’Hérault. La veille du mariage, les parents de la fiancée et ceux du jeune homme, les deux fiancés et les témoins s’installent en cercle au tour d’une table avec les notaires assistés de leurs clercs. Le contrat est lu et signé. Le notaire passe la plume au jeune homme qui signe le premier, ensuite à la future épouse qui le remet à sa future belle-mère, après ce sera le tour de la mère de la fiancée, puis au père du fiancé et ainsi de suite. En réalité, il n’y a que les signatures à apposer, la lecture est une simple formalité ; les clauses ont été débattues et étudiées à l’avance, souvent à l’insu des deux jeunes gens mais toujours à l’insu de la fiancée. Beaucoup de femmes ont souffert de l’humiliation que comportaient les marchandages de ces contrats qui devaient régler la situation pécuniaire des deux futurs conjoints. Quant aux frais du contrat ils restent à la charge du futur marié. Jusqu’aux alentours de 1900, les amis, la famille et les deux prétendants se retrouvent pour une soirée fort élégante avec dîner et bal que la fiancée ouvre avec son fiancé. Elle accorde la deuxième danse au notaire, les suivantes à son futur beau-père et aux garçons d’honneur. Les jeunes gens sans fortunes n’établissent pas de contrat de mariage et se marient sous le régime de « la communauté légale » que le mari gère seul. Les grands mariages ne se concluent pas uniquement dans la société aristocratique. Le monde du Commerce et de l’Industrie a aussi ses dynasties, ses arbres généalogiques, ses gloires familiales quelles que soient les régions de France. Une coutume que j’aime et qui se faisait dans certains village de France. La veille, le jour ou le lendemain des noces, une véritable malle au trésor, est livré aux jeunes époux, sur un char fleuri, parfois à dos de mulet, mais toujours au milieu des chants et des rires ; Avant de devenir au XIXè siècle, une de ces magnifiques armoires qui restent dans les familles, la pièce principale du trousseau est presque toujours un coffre décoré aux initiales des mariés sculptées dans le bois et enjolivées de quelque entrelacs, cœur ou dessin symbolique et de bon augure. Il contient tout le trousseau énuméré dans le contrat : chemises de chanvre, bas, vaisselle (écuelles de bois, de terre ou d’étain, gobelets, cuillères) des draps, des nappes et des serviettes. Si le linge abonde toujours, s’y ajoutent souvent ce que l’on nomme parfois le « fardeau », avec le plus souvent un lit, mais aussi parfois des mesures de grains afin d’aider le jeune ménage à ensemencer son champ au printemps ou à l’automne prochain. Enfin, quelques présents supplémentaires selon les ressources des familles, une jument, une brebis ou une vache et son veau. L’assemblée présente installe le coffre ou l’armoire en un endroit d’où on les bougera jamais plus, tout comme le lit que le curé du village vient parfois bénir avant le jour des noces.



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